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Espace privé SPIP

Paysages en scène

Diane Arbus, Dominique Blais, Olivier Blanckart, Céleste Boursier-Mougenot, Omar Victor Diop, Florence Doléac, Philippe Fangeaux, Aurélien Froment, Piero Gilardi, Joseph Grigely, Ann Veronica Janssens, Suzanne Lafont, Nino Laisné, Ange Leccia, Maria Loboda, Robert Mapplethorpe, Charles Mason, Joachim Mogarra, Aurélien Mole, Pierre Molinier, Shana Moulton, Helmut Newton, Chantal Raguet, Jean-Claude Ruggirello, Sory Sanlé, Daniel Schlier, Cindy Sherman.

Commissariat, Claire Jacquet, directrice du Frac Aquitaine.
Du 13 juillet 2017au 3 septembre 2017
À l’Opéra National de Bordeaux


L’exposition présentée au sein du Grand-Théâtre, splendide écrin architectural crée par Victor Louis, fait se conjuguer les époques et les sensibilités artistiques, s’inspirant des thèmes qui imprègnent l’activité d’une maison telle qu’un opéra - la danse, la musique, les arts de la scène, le jeu, le corps, les décors et les costumes - tout en rejoignant la thématique de la saison culturelle paysages bordeaux 2017. Depuis le rez-de-chaussée jusqu’à l’étage supérieur, sculptures monumentales, photographies, vidéo et installations d’artistes internationalement reconnus (Robert Mapplethorpe, Cindy Sherman, Diane Arbus, Helmut Newton, Pierre Molinier... ) et émergents (Nino Laisné, Aurélien Froment, Shana Moulton, Omar Victor Diop… ) se présentent comme autant d’évocations poétiques liant nature et création ; les œuvres y jouent une sorte de partition globale, où le corps compose et interagit avec le paysage dans lequel il s’inscrit, qu’il soit urbain, naturel, domestiqué, intime, métaphorique ou politique.

Le visiteur est accueilli par le Bouquet perpétuel de Joachim Mogarra. Souvenir des bouquets majestueux qui ont parfois décoré le lieu, cette composition florale est en creux le portrait de l’institution qui elle-même en choisit les fleurs. En écho, Vestito natura betulle de Piero Gilardi, enveloppe corporelle faite de bois en trompe-l’œil, costume de scène ou corset, suggère une nature menacée.
À l’étage, dans les trois foyers, le salon Lalande et au centre de la salle Boireau, c’est l’éclat de la mise en scène qui est souligné comme le suggère la frise peinte sur les faces extérieures de la tente de Philippe Fangeaux, qui crée un décor narratif et ostentatoire obligeant le spectateur à se déplacer pour en avoir une lecture complète.
Qu’elles mettent en jeu ou non du son, nombre d’œuvres de Paysages en scène sont à voir comme des variations musicales. Songs without words (Eartha Kitt) de l’artiste sourd Joseph Grigely restitue l’intensité du moment saisi et traduit la puissance de la voix de la chanteuse photographiée. Un choix de photographies, mettant en évidence un goût pour le déguisement et les artifices, interroge également le corps en représentation dans le spectacle. Omar Victor Diop réalise avec la série Diaspora un travail rigoureux dans lequel il incarne des notables d’origine africaine de la période des colonies et de la traite négrière. Le portrait de Jean-Baptiste Belley s’impose comme un écho à l’histoire de la ville de Bordeaux et à son implication dans le commerce triangulaire. Quant à l’extrême esthétisme des photographies d’Helmut Newton et de Robert Mapplethorpe, leurs œuvres donnent à voir un corps sculptural, puissant, athlétique – un « corps de scène » – façonné pour le spectacle, sublimé et sculpté par la lumière. De lumière, il est aussi question avec L’Été (chapeau) de Ann Veronica Janssens, présenté dans la bibliothèque. Si le chapeau rappelle l’accessoire et le costume de l’acteur, il est aussi, accroché au mur et doré à l’or fin, un symbole du soleil et un réflecteur de lumière. L’objet est ici transcendé ; il devient une icône, une œuvre sacrée nimbée d’une aura… Et n’est-ce pas là le glissement magique que le spectacle suscite ?